Identification de cibles du métabolisme des phospholipides dans la chimiorésistance du cancer colorectal

Le Comité de Côte-d’Or de la Ligue contre le cancer publie aujourd’hui le suivi de chercheurs financés en 2019 via l’inter région, et notamment celui du Pr Dominique Delmas. Ces écrits ont été transmis par le Conseil Scientifique Départemental.

 

Figure 1. Dans une cellule cancéreuse colique chimiorésistante, les deux voies de biosynthèse de la phosphatidylcholine (voie de Kennedy et cycle de Lands) sont exacerbées entraînant une rigidification de la membrane de la cellule tumorale ayant pour conséquence une diminution de l’import des drogues anticancéreuses. L’inhibtion de ses voies permet alors un meilleur influx des agents chimiothérapeutiques et une diminution de leur efflux au travers de la fluidication des membranes entrainant une inhibition de l’activité des transporteurs d’efflux responsables du phénotype de résistance multiple aux drogues de chimiothérapie.
Pr. Dominique Delmas, Université de Bourgogne Franche-Comté, INSERM U1231 ;
Centre Georges François Leclerc, 21000 Dijon, France, financement 2019

Ce projet financé avait pour but d’étudier si certains phospholipides étaient augmentés dans les cellules cancéreuses coliques résistantes à la chimiothérapie et pouvaient ainsi moduler l’action des drogues anticancéreuses. Notre recherche s’articulait autour de deux questions :

1°) Caractériser la composition en lipides complexes et plus particulièrement en phospholipides ;

2°) Déterminer si la modulation du métabolisme lipidique tumoral permet de modifier les imports/exports des agents anticancéreux

Nous avons mis en évidence que plusieurs lipides complexes : la phosphatidylcholine (PC), la phosphatidyléthanolamine (PE), la phosphatidylsérine (PS), l’acide phosphatidique (PA) et leurs lysophospholipides respectifs, étaient plus élevés dans les cellules chimiorésistantes que dans les cellules sensibles. Nous avons mis en évidence que l’exctinction transitoire de l’expression d’une enzyme de la voie de biosynthèse de la PC, LPCAT2, s’accompagnait d’une resensibilisation aux chimiothérapies, ainsi qu’une diminution significative des taux de PC cellulaires, avec une réduction des taux d’espèces de PC contenant des acides gras poly-insaturés. Nous avons montré que la modulation du taux de PC, pouvait influer sur la pharmacocinétique de la mitoxantrone. Ces cellules chimiorésistantes, en plus de présenter des teneurs intracellulaires élevées en PC, semblaient présenter des teneurs plus importantes en cholestérol et une forte expression du transporteur d’efflux de type ABC, BCRP.

Nous avons cherché à préciser les relations entre le métabolisme de la PC et la fluidité membranaire dans différents modèles de cancer colorectal. La fluidité membranaire est directement liée à la composition en lipides complexes et conditionne les mécanismes d’influx/efflux des chimiothérapies et conditionne la réponse aux traitements. L’évaluation de la fluidité membranaire par une sonde fluorescente dans des lignées cellulaires humaines de cancer colorectal, montre que les cellules résistantes ont des membranes plus rigides que les cellules plus sensibles, cette fluidité étant négativement et significativement corrélée à l’expression de LPCAT2. Nous avons pu montrer que l’utilisation de modulateurs du métabolisme de la PC, entraîne une fluidification de la membrane, confortant l’implication de la PC dans la rigidité membranaire des cellules résistantes.

Nous avons déterminé l’expression protéique des transporteurs d’efflux de type ABC, connus pour sous-tendre le phénotype de résistance multiple aux drogues. Il s’avère que la surexpression de LPCAT2 dans les modèles cellulaires résistants s’accompagne de la surexpression du transporteur BCRP. De plus, l’inhibition spécifique de BCRP (Fumitrémorgine, FTC), de la biosynthèse de PC (Edel, TSI-01), des LD (Tria C) réduit significativement l’efflux de doxorubicine dans les cellules résistantes. Ces résultats montrent que le métabolisme de la PC influe sur la fluidité membranaire, sur les capacités d’influx/d’efflux et jouent sur la balance sensibilité/résistance des cellules tumorales coliques.

Conclusion : nous avons démontré que les phospholipides et plus particulièrement la phosphatidylcholine pouvait influer sur les propriétés dynamiques de la membrane des cellules cancéreuses coliques et que la modulation de sa biosynthèse pourrait servir de cibles pour inhiber l’efflux de drogues anticancéreuses et potentiellement permettre de resensibiliser des cellules ayant une résistance intrinsèque ou acquise à la chimiothérapie.

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